Les yeux dans le bleu sur l’itinéraire cycliste la Voie Bleue

De la frontière luxembourgeoise à Lyon, la Voie Bleue est la dernière-née des véloroutes françaises. Serpentant au fil de l’eau sur près de 700 km, elle est très majoritairement aménagée en site propre et accessible au plus grand nombre. Reportage en son cœur en flânant le long du canal des Vosges puis en terre bourguignonne avec ses nombreux attraits au bord de la Saône.

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Pas besoin d’être un cador du vélo pour s’élancer sur la Voie Bleue. ©David Savary

Voilà un itinéraire qui devrait séduire bien des cyclistes, qu’ils soient simples pédaleurs du dimanche ou pratiquants assidus. La Voie Bleue, Moselle-Saône à vélo, nom de code la V50, est une échappée belle de presque 700 kilomètres entre Apach à la frontière luxembourgeoise et Lyon. Elle traverse pas moins de trois régions (Grand Est, Bourgogne-Franche-Comté, Auvergne Rhône-Alpes) et huit départements (Moselle, Meurthe-et-Moselle, Vosges, Haute-Saône, Côte d’Or, Saône-et-Loire, Ain et Rhône).

Signalétique en cours de déploiement

Empruntant des voies vertes et aménagé à 75% en site propre (réservé exclusivement aux déplacements non motorisés), le parcours a tout pour plaire : un faible dénivelé ainsi qu’un cadre naturel apaisant bordé de nombreuses curiosités architecturales et patrimoniales. La Voie Bleue (anciennement l’Echappée Bleue) possède en plus une vocation européenne puisqu’elle est interconnectée avec l’EuroVelo 6 (Bâle-Nevers), l’EuroVelo 17 (ou ViaRhôna, des Alpes suisses jusqu’à la Méditerranée) et l’EuroVelo 5 (ou Via Romea Francigena, de Londres au Sud de l’Italie). Finalement ne manque plus que la signalétique. Comme le souligne Yoann Gauthiot, Chargé de mission pour l’animation du Comité d’itinéraire de cette nouvelle véloroute (voir vidéo plus bas), « le balisage est en cours de déploiement, il sera définitivement mise en place au printemps prochain ».

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Epinal possède un parcours de canoë-kayak en plein centre-ville. © David Savary

Pour vous donner un avant-goût de cette Voie Bleue nous n’évoquerons ici que le tronçon que nous avons eu le privilège de parcourir. C’est à Epinal au cœur  des Vosges que tout commence. Après la prise en main de nos vélos à assistance électrique (VAE) à la Maison du Vélo, nous visitons celle qui est considérée comme la ville la plus boisée de France. Jolis parcs, belles forêts, chemins de randonnée,… Epinal, la cité de l’image, possède sa part de nature propice à la pratique de nombreuses activités outdoor. « Sous l’impulsion de son ancien député maire Philippe Séguin, Epinal s’est même dotée en 1988 du premier parcours de canoë-kayak en centre-ville » souligne la guide locale.

Impossible de se perdre

Le décor est planté. Direction la V50 le long du canal des Vosges. Répartis en petits groupes, chacun avance sur les anciens chemins de halage désormais goudronnés. Chargé de mission vélo au département des Vosges, Christophe Cardot donne le tempo. Et la direction. Même si le risque de se tromper ou pire de se perdre est quasi inexistant. En effet les 73 km de la partie vosgienne sont aménagés en site propre. Sur des routes totalement sécurisées. Que c’est bon de rouler au fil de l’eau dans des kilomètres de nature et de silence. Mais c’est bien connu la faim vient en pédalant. Alors la pause pique-nique au lac de Bouzey, réservoir artificiel qui alimente le canal des Vosges, est la bienvenue. L’endroit idéal pour recharger les batteries. Celles du bonhomme mais pas celle du vélo qui dispose d’une autonomie largement suffisante pour tenir la journée.

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L’Etang de la Comtesse à proximité du lac de Bouzey respire la quiétude des jours heureux. ©David Savary

En guise de digestion, il est possible de faire le tour du lac à pied, environ 1h30. Aux beaux jours, sur le plan d’eau qui est tout de même le plus grand des Vosges, de multiples activités nautiques sont proposées. A proximité du lac se trouve la tourbière de l’Etang de la Comtesse, espace naturel protégé où la faune et la flore s’épanouissent à merveille.

Vin de rhubarbe et nuit insolite

Fortifiés par ce bain de nature, nous reprenons notre monture en direction de la ville thermale de… Bains-les-Bains. Nous sommes à 370 mètres d’altitude. C’est à ce niveau qu’intervient la ligne de partage des eaux entre celles au nord qui s’écoulent jusqu’à la mer du Nord, et celles au sud qui finissent en Méditerranée. Un peu déroutant tout de même ! Pour s’en remettre une dégustation de vin de rhubarbe à la Maison Moine située dans le village de Rasey s’impose. Cet endroit, c’est aussi l’histoire d’une famille qui cultive le BSP (Bon Sens Paysan) comme l’explique Michel chargé de la visite. Cultivée sans engrais ni pesticide sur l’exploitation, la rhubarbe transformée en vin alimente de grands palaces parisiens. Fierté vosgienne !

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Cette ligne de partage des eaux alimente bien des conversations. © David Savary

Les derniers kilomètres de la journée, presque 50 au total, sont peut-être les plus fatigants. Mais pour la plupart d’entre nous, ce sont les plus exaltants car ils sont le gage d’une douce nuit dans un hébergement insolite. En ce qui me concerne, une jolie cabane dans les arbres à la Ferme Aventure (voir encadré plus bas) à la Chapelle-aux-Bois. Un p’tit nid nature pour une nuit réparatrice. Précision, l’itinéraire de la Voie Bleue est suggéré en 23 étapes, soit une moyenne de 30 km par étape. Bien entendu chacun est libre de l’adapter en fonction de son niveau et de ses envies. Autre détail d’importance, pour ceux qui ne voudraient pas s’encombrer de leurs bagages, il est possible de les faire transporter par un prestataire. L’agence évènementielle Roule ma poule fondée par Benjamin et Charlotte fait ça très bien pour nous. En plus Charlotte est l’entraineur adjoint de goalball ( sport de ballon pratiqué par des athlètes déficients visuels), à Sport et Tourisme, ça nous intéresse.

Patrimoine d’exception pour faible dénivelé

Le lendemain, visite de Bains-les-Bains, ville de cure spécialisée sur les maladies cardio-artérielles et les rhumatismes. Pas de soins pour nous au programme mais un passage à proximité de la Manufacture Royale, un bel ensemble du XVIIIème autrefois spécialisée sur le fer blanc. Un tournage nous empêche de visiter les lieux. C’est ici qu’est née Julie Victoire Daubié, le première femme à obtenir son baccalauréat en 1861. Avec ses immenses bâtiments industriels, son château, sa chapelle, son parc aux arbres tricentenaires, la Manufacture Royale propose différents hébergements, gîte et chambre d’hôte. Cyclistes et cavaliers sont d’ailleurs très bien acceptés.

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L’image bucolique par excellence. © David Savary

La manufacture dans le rétro, notre périple se poursuit jusqu’à l’ancien bourg castral de Fontenoy-le-Château. Sur des routes sans difficulté, nous filons le nez au vent admirant au passage cette nature souveraine qui nous enthousiasme tant. En charge de l’aménagement de la véloroute sur le département de la Haute-Saône (environ 140 km pour la Voie Bleue), Pascal Bresson prend le relais de Christophe Cardot. Sans changer de braquet, nous pédalons, non plus le long du canal des Vosges mais le long de la Saône. Ici encore, une jolie maison d’éclusier, un peu plus loin une superbe maison de maître. Au détour de ce long couloir de verdure, un petit port de plaisance, un de plus qui montre tout l’attrait pour le tourisme fluvial dans cette région.

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Sur l’itinéraire de la Voie Bleue, Christophe des Vosges passe le relais à Pascal de la Haute-Saône. ©David Savary

La plus ancienne usine privée de France

Après déjeuner au Chalets du Lac à Passavant-la-Rochère, une partie de l’après-midi est consacrée à la visite de la verrerie-cristallerie de La Rochère. « Fondée en 1475, c’est la plus ancienne usine privée en activité de France » se félicite Eric Zannoni, le directeur des ventes. C’est surtout l’occasion de regarder Guy le maître-verrier et son apprentie Maud souffler et façonner le verre pour le transformer en lampe champignon ou en vase. « Nous sommes le couturier du verre. Il faut au minimum 10 ans pour faire un bon verrier » poursuit le responsable qui reçoit chaque année quelque 70 000 personnes à la boutique.

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Maud, future maitre-verrier à La Rochère. © David Savary

En fin de journée, c’est la découverte d’un autre Monument Historique, le tunnel-canal de Saint-Albin. Long de 681 m, il a été construit sous Napoléon III puis mis en service en 1880. Coupant un  méandre de la Saône, il favorise le passage des bateaux de plaisance. Juste à côté, un bar-restaurant, le Barnayout (du nom d’un bâton de marine pour éviter les obstacles et avancer dans l’eau), permet de faire une pause fraicheur en bord de Saône avant de repartir. Si nous maitrisons parfaitement notre vélo électrique et ses quatre niveaux d’assistance, Pascal lui utilise un vélo Gravel doté d’un seul plateau. Facile, même sur des routes un peu plus vallonnées.

La Bourgogne en flânant

Sur le parcours, pas mal de vaches qui nous dévisagent paisiblement mais assez peu d’hôtels. Ce n’est pas grave, les chambres d’hôtes constituent une belle alternative pour partager un moment de convivialité tout en dégustant la cuisine locale. Avantage, de plus en plus de particuliers sont labellisés « Accueil Vélo » et disposent donc d’un endroit spécifique pour les ranger. Une mention spéciale pour le Tilleul-de-Ray (5 chambres pouvant accueillir jusqu’à 14 personnes), à 200 mètres à peine de la véloroute à Ray-sur-Saône. Stéphanie la propriétaire s’y montre d’une grande gentillesse et se fait fort de préparer le petit-déjeuner avec des produits maison. Lors de votre arrivée, si vous êtes sages, vous aurez droit à une dégustation de vin de pissenlit ou de vin de cerise.

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Depuis le parc du château de Ray-sur-Saône et ses jardins en terrasses, la vue s’étend sur la vallée de la Saône. © David Savary

Après une nuit tout en douceur, c’est reparti pour une journée – la dernière nous concernant – au rythme des découvertes culturelles, gourmandes ou patrimoniales. Et c’est d’abord le château de Ray-sur-Saône et ses 1 000 ans d’histoire qui s’offre à nos yeux. L’endroit mérite le détour, ne serait-ce que parce qu’il domine les méandres de la Saône d’une cinquantaine de mètres. Son parc de 6 hectares aux essences remarquables (tilleuls, cèdres du Liban, séquoias…) invite à la flânerie. Diane Baconnière de Salverte, dernière propriétaire du château, en a fait don au département de la Haute-Saône il y a quelques années pour en assurer la promotion touristique. Le parc, sensible également à l’accueil des cyclotouristes, est ouvert tous les jours. Tout comme une dizaine de pièces qu’il est possible de découvrir via les commentaires d’un guide. « Ce n’est pas un musée mais une demeure habitée » précise Marion chargée de nous faire la visite.

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Le château de Ray-sur-Saône, 1 000 ans d’histoire vous contemplent. © David Savary

Une plage préservée mais pas abandonnée

Nous sentant un peu plus érudits, nous reprenons modestement notre vélo en passant par Savoyeux en longeant son tunnel de 640 m de long et en arrivant à Autet et ses quelque 300 habitants. L’endroit n’est pas neutre car il possède une plage aménagée en bord de Saône, en fait une rive sablonneuse d’où son nom de plage depuis de longues décennies. Elle est accessible par une petite route bordée d’arbres. Un vaste terrain accueille cyclistes, randonneurs et baigneurs qui peuvent aussi profiter de stands de restauration, de tables de pique-nique et même d’un terrain de camping sur les mois d’été. Au cœur d’un territoire préservé et classé (Natura 2000), c’est incontestablement « the place to be ». Un spot qui fait qu’on a parfois du mal à partir, sauf bien sûr en raison de conditions météorologiques désastreuses.

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Quand on partait de bon matin…, à bicyclette. © David Savary

Il est temps de quitter les lieux alors nous partons. La dernière portion de notre périple à vélo doit nous emmener à Gray, cité de caractère aux belles demeures construite en amphithéâtre sur un promontoire. Nous ne prolongerons pas notre parcours plus au sud jusqu’à la cité des Gones, ce n’est pas au programme. Mais après presque 120 km en trois jours, nous avons le sentiment d’avoir effectué un voyage hors du temps. Un vrai bain de nature au grand air. Nous sommes sous le charme d’un parcours inédit composé de belles rencontres, d’émotions sincères et de plaisirs authentiques. Bien loin du tumulte et de l’effervescence des grandes villes. Pour se requinquer il n’y a pas mieux.

Infos et détails sur le parcours ici.

Yoann vous dit tout sur la Voie Bleue

La Voie Bleue en chiffres

  • Porté par 29 partenaires dont 3 régions, 7 départements et une métropole (Lyon).
  • 685 km d’itinéraire au fil de l’eau.
  • 23 étapes.
  • 25 lieux incontournables.
  • 4 vignobles.
  • 15 villages de charme.
  • 3 sites inscrits à l’Unesco.

Séjourner pieds nus à la Ferme Aventure

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Denis, le boss de la Ferme Aventure. © David Savary

À proximité du village de la Chapelle-aux-Boix et de la V50, la Ferme Aventure se présente comme « le premier parc de loisirs pieds nus de France et berceau des nuits insolites Vosgiennes ». A sa tête Denis Duchêne, un sympathique quinqua toujours coiffé de son chapeau de cuir. Amoureux de la nature et des grands espaces, il fait l’acquisition il y a une quinzaine d’année de ce terrain en friche de 8 hectares sur lequel vivent paisiblement des chèvres et des moutons. Progressivement Denis effectue des travaux pour accueillir du public. Il y développe notamment le concept d’hébergement insolite. Cabane dans les arbres, sur l’eau, cube ou pyramide de verre, yourte, chariot western, grenier à foin…, une vingtaine de refuges sont aujourd’hui proposés. Il est même possible de séjourner dans une ancienne Caravelle. Car Denis Duchêne est aussi un passionné d’aviation. Il se prépare d’ailleurs à rapatrier de Pologne deux Antonov ainsi qu’un Noratlas (avion de transport militaire français) pour les aménager et les transformer en hébergement insolite.

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En journée, petits et grands peuvent aussi expérimenter des sentiers en labyrinthes, déambuler dans la mini-ferme, s’amuser sur un toboggan aquatique ou encore faire un escape game grandeur nature. Sans oublier le fameux sentier pieds nus à la découverte de sensations oubliées. Enfin Denis n’hésite pas à faire plaisir à ses hôtes en leur proposant sa Contrex à lui, un petit remontant à base d’alcool de mirabelle. Croyez-moi, ça décoiffe !

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Renseignements et tarifs ici.

David Savary

Rédacteur en chef
Contact: david.savary@sport-et-tourisme.fr

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