Thibaut Wadowski réussit l’ascension du Manaslu, le 8ème plus haut sommet au monde

Le 27 septembre 2021, le Mentonnais Thibaut Wadowski réussit l’ascension du Manaslu, au Népal. Pour Sport et Tourisme, l’alpiniste de 33 ans revient sur son défi sportif et humanitaire.

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Au sommet du Manaslu, Thibaut Wadowski (à droite) et son guide titillent les étoiles. © Thibaut Wadowski

Il aura fallu un mois d’ascension à Thibaut Wadowski pour venir à bout du Manaslu et ses 8 163 mètres d’altitude. Une consécration et un soulagement après un mois d’expédition : « Une journée incroyable qui restera à jamais gravée dans mon histoire » se souvient le professionnel du BTP dans le génie climatique. Au sommet, un simple monticule de neige peu alléchant.  Concernant la vue, « on a un décor qui est complètement monstrueux. Il est même possible d’apercevoir la courbure de la Terre » se souvient le père de famille. Entre le camp 3, le camp 4, son arrivée au sommet, et son retour au camp de base, le français avale 3 000 mètres de dénivelé en 32 heures non-stop. « Je ne m’en suis pas aperçu. J’étais dans un bien-être total, c’est un vrai danger » assure-t-il.

Une abnégation à toute épreuve

Dix jours avant le début de son ascension, le Manaslu n’était pas du tout au programme. Après de nombreux refus des autorités chinoises pour grimper le Cho Oyu au Tibet et un Lhotse au Népal pris par les glaces, le Français décide alors de rejoindre une expédition en cours. Conséquence : il n’a pas étudié la montagne et ses passages risqués. S’en suivent ensuite dix jours de marche pour rejoindre le camp de base, point de départ de l’ascension. Parti le 3 septembre, le sportif termine sa première étape le 4 septembre au village de Besisahar, situé à 840 mètres d’altitude. Lors de son départ pour Tilche, il est confronté à un éboulement. Cela lui prendra deux heures supplémentaires pour le contourner.

Le 8 septembre, il arrive au village de Samagaun, où il se repose et profite d’un peu de confort. Huit jours plus tard, Thibaut foule le sol du Camp 1, où il fait une pause bien méritée : il souffre du mal aigu des montagnes. Les symptômes : mal de tête, fatigue, troubles du sommeil, œdèmes localisés. Pire, cela peut découler sur des œdèmes pulmonaires et cérébraux. Pour l’alpiniste, les fourmillements au bout des doigts lui servent d’alerte face à ce trouble. Le manque d’oxygène, « on finit par s’acclimater, mais on le sent au mètre près ».

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Les fabuleux paysages qu’offrent le Manaslu sont un véritable moteur pour l’alpiniste. © Thibaut Wadowski

Le 20 septembre, l’expédition passe la barre des 6 800 mètres d’altitude et arrive au Camp 2. Les sept derniers jours seront extrêmement difficiles, entre manque d’oxygène, faim, fatigue, et passages ardus. Thibaut doit ainsi rebrousser chemin avant d’atteindre le Camp 3, à cause du mauvais temps. Sa deuxième tentative est fructueuse.  Il parvient à Camp 3 après une montée de 11 heures avant de triompher du colosse en atteignant le sommet le 27 septembre.

Un défi sportif et humanitaire

À peine remis de ses émotions, et malgré ses blessures et une marche longue de plusieurs heures, Thibaut commence ensuite la deuxième partie de sa mission qui lui tenait tant à cœur : acheter des fournitures scolaires pour les enfants népalais à travers The Butterfly Help Project. L’association népalaise a deux objectifs : promulguer les droits des femmes et fournir un droit à la scolarité. « 30 euros, ça scolarise un gamin à l’année » affirme-t-il. Il refuse d’importer quoi que ce soit et achète l’ensemble du matériel au Népal. « Je veux faire vivre le peuple népalais. »

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L’association a construit trois écoles au Népal et œuvre pour en améliorer l’enseignement. © Thibaut Wadowski

À l’origine de sa passion

Il faut remonter à 2015 pour comprendre la démarche de Thibaut. Sa femme souffre alors d’un accident cardiovasculaire. Deux ans plus tard, déterminés à résorber les séquelles de sa compagne, ils décident de partir à l’assaut des montagnes népalaises. Tous deux se fixent l’objectif du camp de base du Kala Patthar, mais parviennent finalement au sommet.  « Rien de compliqué au vu de la praticabilité des chemins, mais tout de même une altitude de 5 644 m ». Il se retrouve alors au pied de l’Everest, et se dit « qu’il reste seulement 3000 m pour atteindre son sommet » . Pour le sportif originaire de région parisienne, c’est le début d’une grande aventure.

Un autre évènement l’a particulièrement marqué et fait grandir. Deux années après son premier voyage, l’athlète retourne au Népal pour tenter de grimper les 7 126 m du Himlung Himal. Sa mère, avant de décéder d’une longue maladie, lui a demandé de déposer ses cendres au sommet de sa prochaine expédition.

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Tout au long de l’ascension, plusieurs camps permettent aux alpinistes de reprendre des forces. © Thibaut Wadowski

Mais tout ne se passe pas comme prévu. En raisons des conditions métérologiques, il doit faire demi-tour : « Je redescends extrêmement en colère de cette montagne. Je me dis que ce n’est pas pour moi, on n’a aucune maîtrise de rien. On peut se préparer autant qu’on veut, on n’est jamais sûr de réussir ». Mais c’est finalement ce qu’il lui plaît dans l’alpinisme, en plus de se confronter aux éléments naturels. « C’est la montagne qui nous accepte et non l’inverse » ajoute-t-il.

Malheureusement, le Français ne parvient pas au sommet. Il déposera alors les cendres de sa maman peu après le Camp 3. « J’ai appris que le sommet n’est pas un but ultime ». Avant d’ajouter : « Mon sommet, c’était également l’école et les enfants népalais à qui je venais en aide ».

« Je pars pour rentrer, mais aussi pour vivre ».

Thibaut Wadowski

Son chemin spirituel

Au retour de telles expériences, le quotidien a une autre saveur : « Serrer votre femme et vos enfants dans les bras, ou tout simplement manger une tartine de pain beurrée ». Quand on lui demande quel est son rapport à la mort, il déclare « Je pars pour rentrer. Mais aussi pour vivre ». Thibaut se sent vivant face aux conditions extrêmes et au danger. Le Népal l’a guidé sur son introspection : « Le chemin spirituel, c’est une acceptation de soi, une écoute active, et un non jugement permanent ». Son moteur : le peuple Sherpa.

Thibaut se souvient d’une rencontre insolite avec l’un d’entre eux. Il devait se rendre à Lukla, afin de s’acclimater à l’altitude avant l’ascension du Manaslu. Départ à 4h pour prendre l’avion, mais ce dernier est plusieurs fois retardé en raison de conditions météorologiques désastreuses. L’alpiniste commence alors à s’impatienter et à douter du succès de son expédition. A côté de lui, un Sherpa attendait le décollage de son avion depuis 7 jours. « Il n’y avait aucune animosité en lui, il était totalement maître de lui-même et de ses émotions. Une spiritualité qu’il apprécie tout particulièrement. « Leur tolérance, leur compassion et leur non-jugement m’inspirent énormément au quotidien ».

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Les Sherpas guident et accompagnent les alpinistes en haute montagne. © Thibaut Wadowski

Prochain objectif pour l’alpiniste : le combiné Everest-Lhotse, en avril 2023 ou 2024. « Ça fait 4 mois que je suis rentré, je n’en peux plus, je veux y retourner ».

Adrien Leroux

Étudiant de 3ème année en management sportif et en journalisme à l'École Supérieure de Journalisme de Lille

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