« Le vélo d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec celui que j’ai pratiqué »

Invité par la marque Krys à l’occasion du dernier Tour de France, le 7 juillet, j’ai eu le privilège de suivre une étape en course – Mont-de-Marsan – Bordeaux – en compagnie de Sandy Casar, un ancien coureur professionnel, vainqueur notamment de trois étapes sur la Grande Boucle.

« Le vélo d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec celui que j’ai pratiqué » 1
À droite l’ancien pro Sandy Casar au côté de son ex collègue d’équipe Mickaël Delage. ©David Savary

Cela fait dix ans qu’il a terminé sa carrière professionnelle. Un gouffre au regard de l’évolution du cyclisme. C’est lui-même qui le dit. « Les avancées technologiques sont telles que le vélo d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec celui que j’ai pratiqué » explique Sandy Casar, coureur de talent devenu pilote sur le Tour de France en charge des invités VIP de la marque Krys. L’avoir avec soi l’espace d’une journée est un super bonus car il aime partager sa passion, nous apprendre sur la stratégie de la course, la mécanique, les progrès…

Des huiles de chaine différentes selon la structure et le dénivelé de la chaussée

Avant même le départ de l’étape du jour à Mont-de-Marsan, l’ancien coureur de la FDJ nous emmène dans le paddock des équipes, là où sont installés les motor-homes avec devant les vélos bien rangés et prêts à l’emploi. Protection contre le Covid oblige, le masque est obligatoire. Sandy évoque le matériel et ces montures dessinées pour fendre l’air, « vous voyez, rien ne dépasse. L’aérodynamisme est comparable à celui d’une Formule 1 ». Le cadre, tout en carbone, la peinture, la selle, « ce fauteuil 4* du coureur », mais aussi les roues, les jantes, le dérailleur électrique…, rien n’est négligé. Et même les huiles de chaine qui sont différentes selon la structure et le dénivelé de la chaussée. Plus technique encore, l’ancien pro nous dit un mot sur les capteurs de puissance, « cette boite noire qui flique le coureur en permanence ». Ce mini-ordinateur de bord qui mesure l’effort et la puissance déployés à l’entrainement ou en compétition, Sandy n’aurait pas aimé l’avoir à son époque car dit-il « cela tue toute forme de spontanéité dans la course ». Il aborde aussi l’alimentation, plus exactement la nutrition qui représente « le plus gros potentiel de gain sur la performance du coureur. Dans le cyclisme moderne, tout est question d’optimisation » nous dit-il.

« J’espère qu’il y aura une échappée, comme ça on pourra s’incruster derrière »

Après ce petit tour dans le paddock où l’on croise dans d’anciennes gloires mais aussi les potentiels vainqueurs du jour, Caleb Ewan, Jasper Philipsen ou Mads Pedersen, il est temps de prendre place dans la Skoda Superb N°18 pour vivre en immersion sur 170 kilomètres l’étape entre Mont-de-Marsan et Bordeaux. Avec son bandeau jaune « Officiel », c’est l’un rares véhicules partenaires pouvant rouler à l’échelon course. « J’espère qu’il y aura une échappée, comme ça on pourra s’incruster derrière » nous dit Sandy Casar. Il faut au minimum un écart de trois minutes pour doubler le peloton et rejoindre le ou les homme de têteLes 176 coureurs au départ sont escortés par un ballet d’environ 250 voitures. La numéro 1, la rouge toujours présente à l’avant, c’est celle du directeur du Tour de France Christian Prudhomme. Celle qui suit le ou les derniers compétiteurs sur la route, c’est la fameuse voiture balai. Afin qu’ils puissent être rapidement identifiés, tous les véhicules sont numérotés et stickés. « Le bandeau jaune, c’est pour l’organisation ASO ; le rouge pour les commissaires qui veillent au bon déroulement de la course ; le vert pour la presse à l’échelon course ; le rose pour la caravane publicitaire… » précise notre chauffeur. Dans la voiture avec nous, Mickaël Delage, un autre ancien pro de la FDJ, lui aussi conducteur pour le compte de Krys, mais de relâche sur l’étape 7.

Peu après le départ, un homme, un seul, se détache dans la fournaise, le Français Simon Guglielmi de l’équipe Arkéa-Samsic. Déjà postés à l’avant, nous accélérons pour gagner du temps et se trouver un p’tit endroit sympathique pour déjeuner à l’ombre. Tout est prévu. Les sièges pliables sont posés. Nous avons droit à une coupe de champagne bien fraiche. Quelques spectateurs s’approchent. Distribution de bobs Krys et une coupette de champagne offerte pour eux aussi. Par souci d’écologie, le repas est servi dans des verrines. C’est délicieux mais il faut s’activer car les champions, eux, n’attendent pas. Nous voyons passer Simon Guglielmi. Il a bon rythme. Mais seul il n’a quasiment aucune chance de gagner. Bien que se pratiquant individuellement, le cyclisme est un sport collectif. En raison principalement du phénomène d’aspiration. En effet un coureur roulant derrière un autre effectue beaucoup moins d’efforts pour aller à la même vitesse car il subit moins de résistance à l’air, de l’ordre de 40%. CQFD.

Une surprise avec un tour en hélico au-dessus des Landes

Au kilomètre 33, à Saint-Gor dans les Landes, une surprise nous attend. Un tour en hélicoptère pour survoler le peloton. La grande classe. Volant environ à 450 mètres d’altitude mais pouvant descendre jusqu’à 200 mètres, l’Ecureuil nous permet aussi d’admirer le paysage et les environs. Vu du ciel, c’est magnifique. Au service de leurs invités, les pilotes effectuent jusqu’à six rotations d’une vingtaine de minutes tout au long de l’étape. Sandy Casar nous récupère au kilomètre 71. Simon Guglielmi file toujours en tête. Mais il ne va pas tarder à être rejoint par deux compagnons : Pierre Latour (TotalEnergies) et Nans Peters (AG2R Citroën).

« Le but de cette voiture, c’est d’être dans les coulisses de la course tout en demeurant le plus invisible possible » rappelle le natif de Mantes-la-Jolie. Pilote ASO mandaté par Krys, l’un des cinq partenaires majeurs du Tour, il est en lien permanent via la radio avec les autres chauffeurs. Afin que tout le monde ne soit pas en même temps au même moment, c’est lui qui organise les roulements à l’avant de la course. Sandy coache aussi Damien Godin, un ancien champion de France sur piste, qui fait ses grands débuts sur la Grande Boucle, « je lui indique comment se positionner, et en fonction des écarts s’il peut doubler ou pas… ». Au total, seulement une quinzaine de voitures ont le droit de s’approcher des coureurs. La sécurité avant tout. Se connaissant entre eux, les pilotes sont tous d’anciens pros qui prennent des jours de congés pour le Tour. Et tous ont effectué au moins une fois un stage de pilotage de deux jours.

« Le seul évènement capable de réconcilier des voisins entre eux »

À bord, nous sommes informés en temps réel par Radio Tour et une tablette télé qui diffuse les images de France Télévisions. Quelques kilomètres plus loin, Sandy Casar prévient, « je vais m’arrêter pour saluer des amis de mon père ». Une dizaine de personnes sont présentes. Elles réclament aussi leur bob Krys. C’est aussi cela la magie du Tour. Des rencontres impromptues. Des sourires. De la joie de vivre. « On assiste parfois à des scènes… Je crois que c’est le seul évènement capable de réconcilier des voisins entre eux. C’est formidable » savoure Mickaël Delage qui lui sait que son fan club basé à Ménesplet l’attend un peu plus loin.

« Nous sommes au cœur d’un stade itinérant. Il y a des règles »

Intercalés entre le trio d’échappés et le peloton, nous avons le loisir d’observer de près les mouvements de la course. À l’avant, privilège rare, nous nous portons à la hauteur de la voiture rouge de Christian Prudhomme. Il nous adresse un amical coucou. La moto d’un commissaire s’assure que nous ne faisons pas n’importe quoi. « Nous sommes au cœur d’un stade itinérant. Il y a des règles. Je ne dois pas passer dans le champ des caméras de télévision » précise Sandy Casar. En nous retournant, nous pouvons également voir le peloton qui chasse les fuyards à vive allure. Bien mieux qu’à la télé.

On prend de l’avance. À Cadillac on s’arrête pour voir passer le trio de tête. Leur avance fond comme neige au soleil. Un soleil qui d’ailleurs tape de plus en plus fort. Le peloton n’est plus très loin. Les équipes de sprinteurs mènent la charge. Les voitures des invités se sont regroupées. Elles prennent un « short cut », un raccourci, pour rejoindre l’aire d’arrivée. Pendant ce temps, Pierre Latour s’est détaché. À moins de 4 kilomètres de l’arrivée, il tient encore tête à la masse compacte du peloton lancé à sa poursuite. Malheureusement pour lui, il ne pourra pas résister… Comme presque toujours comme ça à Bordeaux, l’étape va se conclure par un sprint.

« Le vélo d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec celui que j’ai pratiqué » 8
À Cadillac, le peloton file vers Bordeaux. ©David Savary

Aux premières loges pour assister au sprint royal à Bordeaux

Juste avant l’emballage final, nous sommes déjà installés dans les tribunes réservées au VIP. Bravo Sandy. Le champagne est une nouvelle fois offert par l’organisation. De notre poste, nous sommes aux premières loges pour assister à ce sprint royal. Frappant en cadence les panneaux publicitaires fixés sur les barrières, les spectateurs se font entendre. Le Britannique Mark Cavendish est lancé. À près de 75 km/h sur les quais, il vise un 35ème succès d’étape sur le Tour. Ce qui lui permettrait de dépasser le record du grand Eddy Merckx. Mais dans les derniers mètres, c’est le Belge Jasper Philipsen qui lui souffle la victoire. Le tenant du Maillot Vert vient de cueillir son troisième bouquet cette année.

« Le vélo d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec celui que j’ai pratiqué » 9
Sur les quais, le Britannique Mark Cavendish se fait passer par le Belge Jasper Philipsen. ©David Savary

Le spectacle était beau. À l’image de cette journée. Inoubliable. Nous remercions chaleureusement notre pilote ambassadeur s’occupant des VIP chez Krys. L’orage gronde. L’évacuation générale est demandée. C’est l’heure de partir. Mais il ne pleuvra pas. Gérant d’une station de lavage – cela ne s’invente pas – du côté d’Evreux, Sandy Casar file… laver la voiture à proximité de l’hôtel. Comme chaque jour lors des 21 étapes du Tour. Car il faut déjà songer à accueillir ses invités du lendemain.

David Savary

Rédacteur en chef
Contact: david.savary@sport-et-tourisme.fr

S’abonner
Notifier de
0 Commentaires
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires

La Newsletter de Sport et Tourisme.

Chaque semaine, nous vous envoyons une sélection d'articles consacrés au tourisme sportif.

RECEVOIR LA NEWSLETTER