Axel Alletru : se relever quand tout s’écroule

Ex champion de motocross, devenu paraplégique à la suite d’un accident, Axel Alletru, 35 ans, est aujourd’hui conférencier. Lors du dernier convenc’tour du Cediv au Sénégal, il a partagé son incroyable parcours de résilience. Une leçon de vie, de sport et de détermination.

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Axel Alletru partage son histoire au convenc’tour du Cediv à Dakar. ©David Savary

Entre drame personnel, renaissance sportive et quête de sens, Axel Alletru a raconté face aux adhérents et partenaires du réseau d’agences de voyages Cediv Travel réunis lors de leur convention annuelle à Dakar comment il s’est relevé, au propre comme au figuré.

Axel a cinq ans quand il déclare à ses parents vouloir devenir pilote professionnel. Soutenu dans sa passion, il débute par le BMX à Lille. Très vite, il enchaîne les victoires et les titres – trois fois champion de France, d’Europe, puis du monde – avant de recevoir sa première moto, une 85 cm3. En 2009, il intègre l’écurie autrichienne KTM et participe au championnat du monde de motocross.

À 20 ans, tout bascule en Lettonie

Mais le 27 juin 2010, tout bascule. Lors d’une manche en Lettonie, il chute violemment sur une bosse. Axel reste conscient, mais comprend tout de suite qu’il vient de perdre l’usage de ses jambes. « En une fraction de secondes, je suis passé d’une longue carrière devant moi à une personne handicapée. J’avais 20 ans », précise-t-il.

Opéré à Riga, puis rapatrié à Lille, il pose très vite la seule question qui compte, « est-ce que je vais remarcher un jour ? ». La réponse est incertaine. Il entame alors une longue convalescence, entre soins, doutes et minuscules progrès. « J’ai senti une infime contraction dans ma cuisse. Ce n’était rien, mais c’était suffisant pour y croire ». Depuis son lit d’hôpital, il s’impose toutes les heures un rythme d’entraînement rigoureux.

Au centre de rééducation, il découvre à quel point chaque geste est une victoire. Se tenir assis sans tomber, se transférer du lit au fauteuil, rouler droit. Trois jours avant sa sortie, il tente de se lever avec des béquilles. « Je voulais essayer, ne pas avoir de regret », dit-il. L’équipe médicale repousse sa sortie de deux mois. Il parvient à marcher trente mètres. « Comme un robot, mais sur mes jambes ».

Comment redonner du sens à sa vie ?

La reconstruction ne se limite pas au physique, « j’avais perdu 30 kilos ». « J’avais besoin de redonner du sens à ma vie. Qu’est-ce qui allait me faire me lever le matin ? », s’interroge Axel Alletru. Il explore toutes les pistes. Pourra-t-il conduire, aimer, refaire du sport ? Internet lui offre quelques réponses. « Très peu de gens s’occupent de leur mental. Or, c’est ce qui nous fait vibrer, avancer », souligne-t-il. Il tombe sur des vidéos d’athlètes paralympiques, notamment Oscar Pistorius (spécialisé dans le sprint, il est le premier athlète amputé à concourir dans un championnat du monde pour les valides et à avoir remporté une médaille). « Pas pour ce qu’il a fait ensuite, évidemment (il a tué sa compagne). Mais parce qu’il a couru avec les valides ».

C’est le déclic. Axel se lance un défi fou. Participer aux Jeux paralympiques de Rio en 2016… en natation, alors qu’il ne sait pas nager. Il s’inscrit dans un club, s’entoure, progresse. Il rêve de battre Michael Phelps et Florent Manaudou. Finalement en cinq ans, il devient 12 fois champion de France, bat trois records nationaux et remporte une médaille aux European Masters Games. « J’ai retrouvé ce que j’étais dans le monde valide, un sportif professionnel », explique-t-il. Malheureusement un changement de classification dans les épreuves l’empêche de participer aux Jeux.

Gagner le rallye Dakar devant les valides

En 2020, il se lance un nouveau défi : le rallye Dakar. Un projet colossal, nécessitant 500 000 euros de budget, une équipe, un copilote, et l’accord des organisateurs. Il le décroche après avoir terminé le rallye du Maroc avec succès, étape test imposée par ASO. En janvier, au départ du Dakar, il annonce à son copilote François : « Je veux le gagner ». Ce dernier le tempère : « Si déjà on le termine, ce sera une énorme victoire ».

Les étapes s’enchaînent : top 10, top 5, et même plusieurs victoires. Axel et François franchissent la ligne d’arrivée en vainqueur. « Si on m’avait dit un jour que je gagnerais le Dakar en fauteuil roulant, je ne l’aurais jamais cru », raconte-t-il, trop fier d’être « le premier au monde à avoir gagné ce rallye devant les valides ».

À peine rentré à Roissy, son téléphone sonne. « J’ai enchaîné le Dakar et la maternité. Je ne sais pas ce qui est le plus difficile », sourit-il. Oscar, son fils, naît quelques heures plus tard.

Auto, moto, vélo, il multiplie les exploits

Depuis Axel Alletru multiplie les défis et les exploits. L’Enduropale du Touquet 2024, où il termine 2e au holeshot, ce premier virage décisif à Stella Plage qui suit une longue ligne droite de plusieurs kilomètres. Cette même année, il participe également à l’Etape du Tour de France entre Monaco et Nice. Il devient également relayeur de la Flamme olympique. Autre challenge, la participation au Paris-Roubaix Challenge en compagnie de 170 participants. Cette opération caritative permet de récolter 10 500 euros pour l’Institut du cerveau. « On a pédalé pour la vie », souligne le conférencier.

Son prochain défi est prévu pour septembre 2026. Le triathlon de La Baule, « chacun choisira sa discipline. Tout ça pour dire que rien n’est impossible ».

« Le 27 juin, cela fait quinze ans jour pour jour que j’ai eu mon accident », confie-t-il au pied du phare des Mamelles à Dakar. « Aujourd’hui, malgré 80% de muscles perdus dans les jambes, je peux marcher. Pas parce que j’ai récupéré, mais parce que je me suis adapté ».

La résilience pour apprendre à accepter sans colère

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Axel Alletru, debout pour clore sa deuxième intervention au Cediv, un geste fort, symbole de sa résilience. ©David Savary

Face aux adhérents du Cediv, Axel Alletru résume son parcours par un mot : résilience. « Accepter ce qui est, sans colère. Accepter, ce n’est pas se résigner. » Et de conclure : « Peut-être qu’un jour, dans dix ans, avec la science ou l’intelligence artificielle, je remarcherai. Mais en attendant, je continue à avancer, à rêver, à construire ».

Son message touche au cœur : « Courir, sauter, marcher… Ces petits riens sont la base de la vie. Et trop souvent, on les oublie. Le bonheur, lui, se trouve dans les choses simples ».

David Savary

Rédacteur en chef
Contact: david.savary@sport-et-tourisme.fr

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